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Combattre la déprime

Rav Imanouël Mergui

Le mois de Adar représente selon le Talmud le mois de a JOIE. Je voudrais traiter ici de la question de savoir comment on devient joyeux ? Qu’est-ce qui nous conduit à la joie ? Tout le monde recherche la joie mais tout le monde ne sait pas où la trouver ? Les réponses sont néanmoins multiples je vous propose l’analyse suivante :

Au traité Bérah’ot 10a le Talmud raconte l’histoire suivante (ne vous empressez pas de la lire elle contient des concepts fondamentaux…) : le roi H’izkyahou était atteint de graves maladies et le prophète Yéchayahou est venu lui rendre visite, comme dit le verset (Mélah’im II-20) « le roi Hizkyahou était malade et mourant, le prophète Yéchayahou est venu lui rendre visite en lui rapportant la parole de D’IEU ‘’réunis tes proches car tu vas mourir et tu ne vivras point’’ – tu vas mourir de ce monde ci et tu seras exclu du monde à venir ! Le roi est étonné de cette annonce et demande au prophète des explications. Le prophète lui répond : tu n’as pas entrepris de procréer ! Le roi lui rétorqua : je n’ai pas voulu essayer d’avoir des enfants parce que j’ai vu par voie de prophétie que mes descendants seraient des impies ! Le prophète lui répondit : tu n’as rien à faire dans les secrets de l’Eternel, toi tu dois faire ce qui t’incombe et D’IEU fait ce qui lui convient. Le roi dit alors au prophète : donne-moi ta fille pour épouse, peut-être que nos mérites conjugués donneront des enfants corrects ! Le prophète répondit : le décret divin visant ta mort a déjà était scellé et tu ne peux plus rien faire pour l’annuler ! Le roi s’insurgea et déclara au prophète : sors de chez moi tu n’es plus avisé de ta prophétie, ainsi j’ai appris de mon grand-père le roi David ‘’même si l’épée est posée sur le cou de l’homme, il ne doit pas se retenir d’implorer la miséricorde divine !’’.

De cette histoire exceptionnelle relatant le dialogue d’entre le roi H’izkyahou et le prophète Yéchayahou on peut tirer plusieurs enseignements :

  1. Il est une mitsva d’aller rendre visite à un malade même mourant ;
  2. Le prophète qui va rendre visite au roi malade au seuil de la mort ne se retient pas de lui rappler la cause de sa mort ;
  3. Ne point s’investir dans la mitsva de procréer a pour condamnation la mort dans ce monde ci et l’exclusion du monde à venir ;
  4. L’homme ne doit pas s’immiscer dans les secrets divins,
  5. On n’a aucunement le droit de condamner l’autre en lui disant ‘’tu es mort’’, ceci est grave et qui use de cette formule est condamnable tout aussi prophète soit-il ;
  6. L’homme ne doit jamais perdre espoir même le couteau à la gorge.

Chacun de ces points est un message en soi ; revenons à notre sujet d’ouverture : la joie. Cette histoire nous apprend quelque chose de grandiose : on ne doit jamais perdre espoir, oui jamais !!! Or toute mélancolie est un sentiment de désespoir. Pourquoi et comment ça marche ? Analysons l’absence de simh’a pour mieux retrouver la joie ?

Lorsque l’homme vit une épreuve des centaines d’interrogations l’habitent et le hantent, elles le conduisent à une incompréhension de ce qu’il se passe et de ce qu’il est en train de vivre, il est déséquilibré à tel point de ne plus vivre en harmonie entre lui-même et l’évènement qu’il traverse. Ces interrogations, disons-le clairement, orientées vers D’IEU (pour ne pas dire bien souvent ‘’contre D’IEU’’, créent chez le sujet de la confusion et le plongent dans un chaos total ou partiel. Ce bouleversement le perturbe à tel point qu’il ne connaît plus et ignore toute perspective meilleure qui serait susceptible de lui rendre un peu le goût de la vie. Il pense même ‘’je suis mort’’. Toute situation de non-joie développe un sentiment de mort certaine…

J’ai envie de nommer ce phénomène par le terme hébraïque de SAFЀKE, traduit communément par : le doute. Ce ‘’doute’’ abolit notre joie. Selon ma démonstration (j’espère que vous me suivez et qu’elle vous semble claire, même si néanmoins elle nécessite plus de développement), pour retrouver la joie le sujet devra sortir du ‘’safèke’’. La question s’impose : comment sort-on du ‘’safèke’’ ?! Nous trouverons la réponse, me semble-t-il, dans l’enseignement de nos Sages enseigné au Pirké Avot chapitre 1 michna 16 : « Raban Gamliel disait ‘’fais toi un Maître ainsi tu seras épargné du doute’’ ! ». Avant de comprendre comment ça marche, Raban Gamliel voit dans le Maître, le RAV, le remède à tous nos maux – ceux qu’on a nommé ici par le ‘’safèke’’. Le RAV qui a comme rôle à jouer celui d’enseigner la Tora et de guider le peuple a ici une fonction bien assez particulière celle de sortir l’homme du doute. Si le doute est définit comme ce que j’ai développé jusque-là c’est-à-dire par la confusion, alors celui qui a un RAV ne connaîtra plus ce genre de sentiments. Et disons-le sans RAV on ne peut pas s’en sortir ! Individuel communauté le RAV a cette fonction de permettre à l’homme de vivre un monde clair. Si la clarté, je veux dire ce qui nous sort de la confusion, est obtenue à travers le Maître il faut rajouter un point important ; le RAV n’est pas seulement celui qui sort l’élève qui était dans le ‘’safèke’’ – ceci est une situation à posteriori, il faut voir dans le Maître celui qui fera que l’élève ne sera jamais dans le ‘’safèke’’, écrit le Séfat Emet dans son commentaire sur Pirké Avot. Parce que, lorsqu’on a un RAV on lui soumet TOUTES les interrogations et les questions qui traversent notre vie, dit-il. On doit rajouter à cela un point fondamental dans l’idée : le RAV donne une ligne de conduite à l’élève qu’il devra suivre en toute circonstance et lorsqu’on a une ligne de conduite tracée par la voie de la sagesse on ne rencontre plus de carrefour ambigu qui brouille nos routes et nos esprits… La pire des choses qui puisse arriver à l’homme, dans son individualité comme à l’échelle communautaire, c’est l’absence du RAV ! Quand on a un RAV les choses sont claires et il n’y a donc plus de place à la déprime… Ce message prend un sens particulier à l’approche de la fête de Pourim : personne n’a voulu suivre les conseils de Mordéh’aï !