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L’aventure du “moi” – Partie 1

Rav Imanouel Mergui

Il n’y a rien de plus proche à l’homme que lui-même !

C’est une réalité voire une évidence.

On a tendance cependant à l’oublier, on peut aller s’occuper du monde entier mais on oublie parfois de s’occuper de soi même !

Selon le Talmud cette affirmation vient nous dire que l’homme ne peut pas porter de témoignage le concernant. C’est une règle d’une extrême complexité en matière de droit talmudique… (voir notamment traité Sanhédrin 9A).  Cela veut dire que l’homme manque d’objectivité par rapport à lui-même ! On a besoin de solliciter le regard de l’autre sur nous même pour s’assurer de la bonne marche à suivre. Il y a des personnes qui n’aiment pas demander conseil, ils préfèrent faire leur propre expérience, ou ils sont sûrs d’avoir toujours la meilleure idée et sont certains de ne jamais se tromper. Cela va jusqu’à dire que lorsqu’ils se trompent ils trouveront toujours une raison extérieure et une faute chez l’autre mais jamais chez eux. On peut rattacher cela à de l’orgueil, mais il me semble que la raison profonde est ce manque de regard objectif sur soi à tel point qu’on se perçoit toujours comme un être parfait et sans défaut. Ce n’est pas là que de l’orgueil c’est plutôt et surtout du mensonge. Ce mensonge de l’homme envers lui-même. Mensonge inconscient. Il nous insupporte d’entendre une critique de quiconque, de nos parents, de nos conjoints, ou de tout autre soit-il. On refuse même la sentence divine, les épreuves qu’IL nous envoie, etc. Ce refus provient de ce manque d’objectivité de l’homme vis-à-vis de lui-même. Il apparaît de la sougya que ce regard erroné qu’on a de soi ne soit pas une tare ! Effectivement c’est dans la nature même de l’homme que d’ignorer ses défauts. D’IEU nous a mis dans un monde où l’homme peut et doit évoluer si tant est qu’il comprenne et constate son imperfection. Son évolution passera donc inévitablement par le regard que l’autre porte sur ma vie. La tare est celle de refuser ce regard extérieur. On vie le regard extérieur comme étant une intrusion dans notre vie privée, cela nous dérange. On a du mal à entendre ce que l’autre a à dire sur nous. Il y a des choses que nous ne pouvons voir nous même sur nous même, c’est extraordinaire et incroyable, insupportable mais vital. L’homme préfère divorcer plutôt que d’écouter les critiques de son épouse. La femme préfère divorcer plutôt que de taire les critiques qu’elle a à dire à son mari. Le calcul est vrai également dans le sens inverse. Cela ne veut pas dire qu’on doive sans arrêt dire à l’autre ce qu’il a à corriger ; d’où la question : si l’autre ne peut évoluer seulement si je lui fais une remontrance, or cette remontrance il ne l’accueillera pas agréablement, il va la refouler, alors que faire ? Dire et mettre une mauvaise ambiance, ou taire en acceptant l’erreur de l’autre ?

A quoi est due cette méconnaissance de soi ?

L’homme est composé de deux parties : le corps et l’âme. Dans la Tora la composition double de l’être est très claire dans les versets de Béréchit où la description de l’être y figure. Chacune de ces parties est un monde en soi, et les réunir en est un troisième. L’homme se trouve et se défini au carrefour du corps et de l’âme. Rappelons que même ceux qui, malheureusement ne croient pas à la Tora, comprennent que l’être humain n’est pas que corps. Ils sentent et ressentent en eux-mêmes la doublure de leur personnalité ! On l’appellera l’esprit, les traits de caractère, la faculté d’opérer des choix, les différentes sensibilités de l’être, etc. – en simple tout ce qui ne se trouve pas chez l’animal. La Tora reconnaît toutes ces facultés et les surdimensionne encore plus. Quoi qu’il en soit l’être humain ne cesse de se surprendre. L’aventure du soi est immense, infini, mais à définir. C’est ce point que je voudrais étudier avec vous les semaines à venir dans les lignes de notre parution. Le point de départ c’est de reconnaître en toute vérité qu’on ne se connaît nullement ! Qu’on a tant à apprendre sur nous-mêmes ! Que notre vie ne se limite pas aux jours qui nous sont impartis. Que notre vie soit une aventure extraordinaire, celle-ci composée d’un corps dont la science ne cesse d’en découvrir les facultés, et d’une âme si profonde et si élevée. L’objectif est d’atteindre le moi, absolu ou relatif, qui fait de nous ce que nous sommes, ce que nous pouvons être, celui dont nous avons et détenons la possibilité de découvrir à l’infini pour que notre vie soit comblée avant tout du moi essentiel…