Rav Imanouel Mergui
(article dédié à la mémoire du Gaon Rav Yaakov Haï Yossef zal et de Monsieur Chalom Pierre Bensemoun zal)
La question de la pudeur traite d’un des sujets des plus sensibles et des plus fondamentaux de la Tora, à tel point que mon Grand Maître Rav Wolbe ztsal écrit «Israël ne se distingue uniquement par sa qualité de tsénioute (pudeur) » (Alé Chour II page 595).
L’été approche et on a facilement tendance à se découvrir. Le plaisir de l’été est gâché par l’épreuve du chaud. Or la Tora limite notre comportement pudique. ‘’J’ai chaud !’’ ne tolère en rien une tenue vestimentaire non conforme à la halah’a. Quelque-soit le vêtement porté on devra s’assurer de son aptitude pudique ; chemisier, jupe, robe, chaussette, collant, chaussure, perruque, foulard etc.. Couleur. Forme. Enfin : les parties du corps qui doivent être couvertes. A fortiori qu’il est grave pour une femme, ou une jeune fille de se tenir en maillot face à des hommes, juifs ou non juifs.
Et avant l’âge de la bat mitsva qu’en est-il de la tsénioute ? Rav Eliyahou Falk dans son Oz Véhadar Lévoucha écrit « Certains décisionnaires sont d’avis qu’à partir de l’âge de trois ans il est un devoir de vêtir les petites filles de façon pudique. D’autres décisionnaires pensent que l’obligation d’habiller les petites filles en respectant les lois de la tsnioute commence à partir de l’âge de sept ans. Il est difficile de trancher la halah’a, certaines communautés suivent la première opinion alors que d’autres suivent la seconde. Lorsque le Steipler zal arriva en Erets Israël il imposa à ses filles en bas âge de respecter scrupuleusement les règles de la tsénioute, les gens qu’il rencontra trouvèrent cela assez étonnant vu que ce n’était pas l’habitude répandue. Son épouse alla voir le H’azon Ich (l’épouse du Steipler était la sœur du H’azon Ich) pour lui demander conseil. Le H’azon Ich lui répondit ‘’pourquoi es-tu gênée par les critiques des gens qui t’entourent ? Ce ne sont pas tes filles qui sont bizarres mais c’est plutôt ceux qui habillent leur fille de façon légère qui sont étonnants !’’ ». Mais attention il est important de rappeler que s’habiller tsénioute n’est pas synonyme de mal s’habiller ! On peut être très classe, porter de très beaux vêtements, ceci n’est pas contradictoire aux règles de tsénioute. Il est vrai néanmoins que le milieu et l’entourage dans lequel on vie peut avoir une influence sur notre vestimentaire, comme dans toute autre chose d’ailleurs, mais il est vrai qu’en matière d’habits on est plus sensible aux dires des autres et les femmes sont encore plus sensibles que les hommes sur ce sujet. Il n’est pas évident d’éduquer une petite fille à s’habiller tsénioute quand toutes ses copines à l’école ne le sont pas. Il faudra encourager la fille et lui dire que c’est elle qui fait les choses comme il se doit. Il faudra également que les parents lui expriment toute leur fierté de voir leur fille se vêtir selon les règles de la halah’a. Il est clair et de toute évidence qu’on pourra éduquer les petites filles à se vêtir pudiquement seulement si la maman respecte ces lois. Mais si le bénéfice d’une maman tsénioute c’est de voir ses enfants respecter ces lois, en vérité le bénéfice va bien au-delà de cela ; effectivement le Talmud au traité Yoma 47a raconte qu’une femme du nom de Kimh’it avait sept fils et tous étaient des Cohanim Guédolim effectuant le Service au Bet Hamikdach. Les Sages lui demandèrent quel est ton mérite ? Elle répondit ‘’les poutres de ma maison n’ont jamais vues mes cheveux’’. La pudeur de la mère influe même sur les garçons ! La pudeur engendre des enfants saints – écrit le Maharal. Rav Yitsh’ak Yossef dans son Yalkout Yossef Dinei H’inouh’ écrit :
« les parents n’ont pas le droit de vêtir les petites filles avec des vêtements courts – pour certains décisionnaires tout au moins à partir de l’âge de huit ans. A fortiori qu’il ne faudra pas amener les petites filles à la synagogue lorsqu’elles sont vêtues de vêtements courts puisque ceci sera gênant pour les prières, du fait qu’il est interdit de prononcer le Chémâ et le Kadich en présence même de petites filles ne respectant pas les lois de la tsénioute ! ».
Certaines femmes ont tendance à négliger les lois de la tsénioute prétextant que ‘’ceci est difficile’’ – c’est vrai que c’est une épreuve et davantage en été, ou d’autres qui verront une forme d’inégalité d’avec les hommes puisque ces lois touchent singulièrement les femmes. Surtout que la femme est sensible à l’habillement en tout cas plus que l’homme. Le Talmud au traité Erouvin 100b explique que suite à la faute de H’ava, la première femme de la création, D’IEU l’a punit de dix malédictions, trois d’entre elles touchent directement la pudeur de la femme : tovaâte balev – la femme ne peut inviter verbalement son mari à une liaison intime, atoufa kéavel – elle ne peut sortir publiquement lorsqu’elle a les cheveux découverts, h’avoucha bébète haasourim – elle ne peut trop sortir dans les lieux publics. Les lois de la pudeur contiennent toute l’histoire de la femme, son vécu, son apparence, ses pulsions, ses tendances, ses attirances, son être tout entier physique, psychique, existentiel !
Lorsque le Choulh’an Arouh’ Orah’ H’aïm chapitre 3 paragraphe 2 stipule qu’il faut être pudique même aux toilettes !, on peut être surprit de déduire que la pudeur est d’or même lorsqu’on doit se découvrir, et même lorsqu’on est seul ! Sur place le Biour Halah’a rapporte au nom du Sefer Mitsvot Katan que la pudeur est une loi de la Tora ! La pudeur n’est donc pas qu’une question de morale ou de ‘’religion’’, c’est un commandement de la Tora qui s’impose en toute circonstance.
Les lois de la tsénioute vont bien au-delà de ces quelques lignes : peut-on aller à la plage ? A la piscine ? Un homme a-t-il le droit d’écouter une femme chanter ? La mixité ! Un homme a-t-il le droit de serrer la main à une femme ? Qu’en est-il du médical : un homme a-t-il le droit de consulter une femme et vice versa ? Les lois de la pudeur pour les fiancés ! Les lois de la pudeur lors d’évènements joyeux : mariages, bar mitsva etc., et également lors d’évènements douloureux tel le deuil (voir notamment Choulh’an Arouh’ Yoré Déa 340-11 et 359-2).
Il est intéressant de rapporter ce que note la Rabanite Esther Farbstein Besseter Raam (pages 146-147) « dans les camps de concentration les Rabanim bataillaient pour que les juifs puissent garder leur comportement vestimentaire conforme à la halah’a aussi bien pour les tenues des hommes que pour les tenues tsinoute des femmes puisque ceci touche les éléments qui se tiennent dans les hauteurs du monde – dévarim haomdim béroumo chel olam ! ».
Nos Maîtres nous enseignent que la sortie d’Egypte, c’est-à-dire tout l’enjeu de la fin de l’exil s’est réalisée par le mérite des femmes pieuses d’Israël ! Quelle est cette piété qui a conduit à la libération d’Israël ? Rav Moché Feinstein zal explique que c’est la pudeur ; effectivement, dit-il la femme pudique est celle qui ne s’expose pas à l’extérieur, ce faisant elle est préservée des influences de la rue et des évènements qui nous éloignent de D’IEU !