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L’Argent

Rav Imanouel Mergui – Rav Imanouel Mergui – Roch Kolel Roch Kolel Roch Kolel

«D’IEU dit à Moché : quand tu établiras le compte glo ’ bal des enfants
d’Israël… chacun d’entre eux devra donner à D’IEU une expiation ’’de’’ sa personne נפשו
כפר …Voici ce qu’ils devront donner… la moitié d’un chekel…Le riche ne doit pas donner
plus et le pauvre ne doit pas donner moins que la moitié d’un chekel, afin de donner le
prélèvement divin dans l’intention d’expier vos personnes. Tu prendras l’argent des
expiations – Kessef Hakipourim הכפורים כסף …pour expier vos personnes » (Ki Tissa 30 – 11
à 16).
La paracha attribue à l’argent une dimension expiatrice. On peut donc se poser la
question : à quoi sert l’argent ? Qui ne court pas après l’argent ? Toujours plus d’argent !
Encore de l’argent ! Combien de risques prenons-nous dans la vie pour posséder de l’argent ?
Pour quoi faire ? Acheter ! L’argent a aussi la faculté de nous installer dans une certaine
assurance, en plus du confort… Bien entendu nous lui reconnaissons également la possibilité
de faire des mitsvot et des bonnes actions. Même si, cependant, ce n’est pas la moitié de notre
argent qui est utilisée pour faire des ‘’bonnes affaires’’. Toujours est-il, avons-nous pensé
une fois qu’avec notre argent nous aurions pu racheter notre personne et bénéficier d’une
expiation ? Attention !!! Avant d’essayer de définir de quelle expiation s’agit-il, ne nous
faisons pas d’illusion en pensant qu’il nous est possible de fauter et qu’en suite, en donnant de
la tsédaka, on aura racheté nos fautes. On n’achète pas D’IEU. On ne s’arrange pas avec Lui
en le soudoyant par l’argent. « Kessef Hakipourim », telle est l’expression du verset. Bien
entendu cela nous rappelle le grand jour de Yom Hakipourim. Il y a dans l’argent cette
dimension aussi élevée et extrême. Le Even Ezra constate également ce parallèle et, selon lui,
cela nous indique que de la même façon que nous faisons Kipour une fois par an ainsi le
Kessef Hakipourim devait être prélevé une fois par an. Selon le Baal Hatourim nous trouvons
là une allusion au conseil du midrach Tanh’ouma de promettre de la tsédaka le jour
de Kipour.
Pour le NETSIV c’est l’idée suivante qu’il faut retenir : avec ce demi sicle prélevé on
confectionna les adanim, ces socles d’argent qui soutenaient les poutres du tabernacle. Ces
socles représentaient la matérialité de ce monde. Le Kessef Hakipourim vient expier celui qui a
fait de ce monde-ci, et de la matérialité, un essentiel dans sa vie. Toute sa préoccupation n’est
autre que l’argent. On vit pour l’argent ou l’argent pour vivre ? Faut-il projeter sa vie en
fonction de son argent, ou gérer son argent en fonction de ses projets ?! L’argent est-il un but
ou un moyen ? On peut constater que chez certaines personnes l’argent a une double fonction :
moyen et but, n’ont-ils pas fait de leur argent un moyen d’en acquérir davantage ?!
On peut lire dans le midrach : Lorsque D’IEU annonça à Moché qu’il fallait récolter
le Kessef Hakipourim, il s’étonna « Tout ce que l’homme possède suffirait-il pour expier ses
fautes ? ». Rabi Yéhouda bar Ilaï dit : Moché s’est étonné sur la somme à donner puisque par
ailleurs il est dit un Kikar d’argent. Rabi Yossé dit : Moché pensait qu’il aurait été plus juste de
donner 100 pièces d’argent comme il est dit à propos de celui qui diffuse une information
diffamatoire sur la jeune fille qu’il vient d’épouser. Or les enfants d’Israël ont usé d’un tel
comportement en proclamant sur le veau d’or « voici ton D’ieu, Israël ». Selon Rech Lakich on
devrait donner 50 pièces d’argent comme l’amende imposée par la Tora au violeur, puisque
nous avons violé la parole divine annonçant « tu n’auras pas d’autres puissances ». Pour Rabi
Yéhouda bar Simon nous sommes comparables au taureau qui encorne, nous avons échangé
D’IEU contre un veau, la somme serait donc de 30 chekel.
Le Kéli Yakar explique ce midrach : nous savons que les enfants d’Israël ont
transgressé quatre fautes lors du veau d’or :1) l’idolâtrie, 2) la débauche, 3) le meurtre et 4) la
médisance. Lorsque D’IEU annonce à Moché qu’après cette faute les enfants d’Israël devaient
donner Kessef Hakipourim, Moché se posa la question de savoir sur quelle partie de la faute
fallait-il relever cet argent. C’est le sens des quatre opinions rapportées dans ce midrach.
E t pourtant D’IEU ne demanda qu’un demi sicle ! C’est, poursuit le Kéli Yakar,
parce que nous savons que toute faute et toute erreur ne peut être réparée seulement si on fait
un travail à la base. C’est l’origine de la faute qu’il faut arranger. Qu’est-ce qui a conduit le
peuple à commettre de telles fautes ? Qu’est-ce qui a encouragé le peuple à adopter de tels
comportements. Leur ARGENT !
Si l’argent a la faculté d’entraîner l’homme à commettre des fautes aussi graves, il a
aussi les moyens de conduire l’homme à commettre l’insensé. Le Messilat Yécharim (chapitre
11) écrit : « L’argent conduit l’homme à transgresser les commandements de la Tora, et même
les
lois de la logique pourtant naturelles ».
La Tora dans ce Kessef Hakipourim a fixé une toute petite somme « un demi sicle »,
et cette somme est identique pour le riche comme pour le pauvre. Car, ce n’est pas la quantité
d’argent qui fera office d’expiation mais le travail qu’on effectuera à travers ce don. Or on
peut donner beaucoup d’argent mais si on n’a pas fait une analyse du problème, qu’on n’a pas
rétablit la fonction de l’argent à sa juste place, on récidivera dans l’erreur. Le demi chekel est
un peu comme le franc symbolique où la quantité n’est pas l’essentiel mais plutôt la qualité.
C’est bien là d’ailleurs un principe fondamental dans la vie du juif basée sur les valeurs de la
Tora. Ce demi sicle ne vient pas expier la faute mais « votre être » נפשתיכם .La valeur de
l’homme ne se définit pas à travers son compte en banque mais plutôt à partir de ce qu’il vaut
réellement dans toute sa personne. Si l’argent conduit l’homme à transgresser la Tora et à
commettre l’insensé, il a aussi, et plus grave encore, le ‘’don’’ d’étouffer l’être profond qui
nous anime, notre nefech נפש .Ce demi sicle appelé Kessef Hakipourim (verset 16) est avant
tout appelé Kofer Nafcho (verset 12).