Rav Imanouel Mergui
Pessah’ est une fête d’une très grande importance, elle marque un tournant important dans l’histoire du peuple juif. J’aime rappeler l’idée du Maharal qui voit dans la fête de Pessah’ le début de la délivrance future ; bien vivre Pessah’ c’est entamer le processus de la venue du Machiah’. Je voudrais vous faire part de deux constats qui m’ont toujours surpris quant à la fête de Pessah’. Le premier point c’est la quantité innombrable de commentaires qu’il y a sur la hagada, ils se comptent par centaine ! Le second, et c’est davantage sur celui-là que je voudrais m’arrêter c’est la quantité de halah’a que connaissent ces huit jours de fêtes. Déjà dans le Choulh’an Arouh’ Orah’ H’aïm on compte soixante-six chapitres du siman 429 au siman 494, plus trente-cinq chapitres relatifs aux lois de Yom Tov. Personnellement ça me surprend, et surtout ça me fait prendre davantage conscience de l’importance de cette fête.
Voici en quelques mots les grands titres qu’on peut rencontrer dans le Choulh’an Arouh’.
Les lois de :
- Chabat hagadol,
- La recherche du h’amets,
- Les aliments composés à base de h’amets (notamment les médicaments),
- La cachérisation des ustensiles de cuisine pour pessah’,
- La fabrication des matsot,
- Les lois de la veille de pessah’,
- Toutes les lois du seder de pessah’,
- Les lois du compte du ômer.
Alors qu’est-ce qu’un juif qui vit pleinement Pessah’ ? Ce n’est pas celui qui fait des boulettes ou qui jette le maror par la fenêtre ! Ce n’est pas non plus celui qui traite les autres de pratiquer excessivement cette fête. C’est celui qui se libère, qui se tourne vers lui-même, qui s’assoit pour étudier la Tora et particulièrement la Halah’a pour au moins une fois dans sa vie vivre correctement Pessah’. Pessah’ ne se limite pas à faire ses courses dans une épicerie cachère pour remplir son ventre de gâteries cachère lépessah’, je n’ai rien contre
mais ce n’est pas l’essentiel. Quand Pessah’ arrive on a l’impression que c’est la guerre… Et, méfiez-vous des produits dits cachère lépessah’ dont la surveillance laisse à désirer… Pas non plus besoin d’acheter du savon, du parfum ou du cirage cachère lépessah’… Les médicaments connaissent également une part importante de halah’a… Pessah’ ce n’est pas refaire sa tapisserie ou tous autres travaux à la maison… Pessah’ n’est pas non plus la fête des coutumes, j’ai l’habitude de dire que personnellement j’ai une seule coutume celle de ne pas en avoir ! Certes les coutumes ont toute leur importance mais le juif ne se limite pas à ses coutumes. Toute chose a une définition, une règle ; un bon juif c’est celui qui respecte la halah’a dans toute chose. On n’invente pas la Tora, on la pratique comme D’IEU nous l’a ordonnée et comme les Maîtres nous l’ont enseigné. Et même si on va passer Pessah’ dans un séjour organisé il y a là aussi des choix à respecter, autres que ceux de la destination ou du prix, je veux dire s’assurer d’une bonne cacheroute aussi bien alimentaire qu’au niveau de l’ambiance. Qui est le Rav qui garantit la caheroute ainsi que toute l’atmosphère de la fête ?! La piscine à l’hôtel est-elle séparée ? Les prières et les cours sont-ils assurés ? Etc…
Le Déricha écrit : les gens qui n’ont pas beaucoup de temps pour étudier à cause des activités professionnelles doivent davantage étudier la halah’a, il est bien d’étudier le Talmud mais lorsqu’on n’a pas beaucoup de temps alors l’étude de la halah’a pratique prime. Le Gaon Rabi Zalman explique également qu’en étudiant la halah’a ils sauront pratiquer correctement les mitsvot et ne trébucheront pas. Les propos du Gaon Rabi Yéhonatan Eibechits sont connus : celui qui n’a pas étudié deux ou trois fois les lois de Chabat il est évident qu’il transgresse Chabat ! Rav Ovadya Yossef chalita écrit dans son Halih’ot Olam volume 8 page 337 que s’ils n’étudient pas la halah’a ils ne sont même pas acquittés de la mitsva du devoir d’étudier la Tora ! Il est évident que toutes les parties de la Tora doivent être étudiées, nous parlons là de celui qui n’a très peu de temps à consacrer à l’étude alors celle de la halah’a prédomine. Au traité Nida 73a les Maîtres enseignent « tout celui qui étudie la halah’a tous les jours il est certain d’être admit au monde à venir ». Le terme halah’a de l’étymologie holèh’e en hébreu veut dire marcher, avancer. La halah’a c’est emprunter un chemin qui aboutit à ‘’quelque chose’’ ; en réalité toute étude soit-elle conduit à quelque chose, il n’existe pas d’étude inutile – seuls les ignorants défendent l’inutilité et la stérilité de l’étude. Cependant l’étude de la halah’a qui a d’emblée l’avantage d’être mise en pratique immédiatement, puisqu’elle dicte à l’homme le comportement
concret à adopter ; néanmoins, cette praticité de la loi n’a pas qu’un enjeu technique, elle est la voie qui conduit au bonheur absolu celle du ôlam haba. Parce que si la halah’a nous guide dans ce qu’on doit faire c’est qu’elle change inévitablement le mode de vie de l’homme et ce même changement comportemental donne à l’homme automatiquement une autre vision des choses et du monde. D’ailleurs la halah’a conduit l’homme pas à pas dans tout ce qu’il fait, le moindre petit geste doit s’inscrire dans le code de la Tora. Nul domaine de la vie quotidienne, depuis les plus petits gestes qu’on fait le matin au réveil jusqu’à l’endormissement de la nuit, est exempt de la pratique et de la vision de la Tora. C’est cela même la vie du monde futur ! Qu’on pourrait traduire la vie future de ce monde. Ce monde renferme quelque chose du ôlam haba qu’on retrouve dans l’étude de la halah’a.
Revenons un tant soit peu sur cet enseignement de la fin du traité Nida 73a conseillant à l’homme d’étudier la halah’a pour connaître le ôlam haba. Tout d’abord il faut savoir que cet enseignement clôture le Talmud ! Comme si les Maîtres voulaient nous dire : tu as fini d’étudier, sache que tu ne fais que commencer de marcher. AVANCE… Le Maharcha fait un constat intéressant : étudier la halah’a pour ne pas user de h’oumrote (sévérités). C’est-à-dire : lorsqu’on ignore la halah’a il y a deux types de personne. La première catégorie de gens s’autorise beaucoup de choses par prétexte que ‘’ce n’est pas possible que la Tora nous l’interdise’’ (ou encore ceux qui se disent ‘’qu’est-ce que ça change à D’IEU si je ne fais pas la Tora’’). La deuxième catégorie ignorant elle aussi la halah’a va s’interdire des choses de peur de transgresser, partant peut-être d’un bon sentiment, cet état d’esprit est également un tort. Ces deux catégories de gens sont dans l’erreur. La Tora ce n’est pas comme l’homme l’envisage, ou comme les choses l’arrangent, ou comme il croit faire bien. La halah’a va justement nous apprendre à définir quand les choses sont autorisées et quand la même chose sera interdite. Il n’y a pas de réponse ‘’tout oui’’ – ‘’tout non’’ dans la Tora. Chaque cas est étudié et chaque réponse est adaptée…
Néanmoins une règle d’or s’impose ‘’assé léh’a rav’’ – ‘’fais toi un maître’’. D’ailleurs Moché qui avait de nombreuses qualités et fonctions on a gardé de lui communément une seule ‘’RABÉNOU’’ – ‘’NOTRE MAÎTRE’’. Sortir de l’Egypte c’est se faire un maître… !!! Le maître guide l’élève vers la délivrance. Si ce principe est vrai dans toute la Tora il l’est surtout dans le domaine de la halah’a. On a un médecin traitant, on a un banquier, on a une brosse à dent, on a une épouse, on doit avoir un seul RAV. Que la réponse du RAV corresponde ou
non on doit la suivre. Si votre médecin vous annonce une maladie vous ne changez pas de médecin, vous suivez son diagnostic et ses conseils. Un RAV ce n’est pas une paire de chaussette qu’on change tous les jours. D’ailleurs ceux qui n’ont pas suivi Moché Rabénou périssent en Egypte ou dans le désert.
Assurons nous de passer une fête de Pessah’ digne de ce nom, digne de l’histoire d’Israël, afin que Pessah’ ouvre la porte de la délivrance finale. Amen ken yéhi ratson.