Rav Imanouel Mergui
« Rabi H’anan enseigne : trois rêves annoncent la paix ; celui qui voit dans son rêve un fleuve, un oiseau ou une marmite vide ! » – traité Bérah’ot 56b. Nous savons que le rêve et son interprétation occupent une place importante dans la vie de l’homme et, la Tora consacre beaucoup de pages et de lignes sur ce phénomène. Je ne m’arrêterais pas ici sur cette étude gigantesque, j’ai choisi ce passage parce qu’il est d’actualité, en plus d’être passionnant ! D’actualité parce que son sujet est la paix, ce chalom que chacun traduit un peu n’importe comment et surtout comme ça l’arrange ! On peut d’emblée lire une idée dans cet enseignement : le fleuve fait référence au courant de la vie, l’oiseau représente la société, et la marmite est le symbole du couple. C’est bien dans tous les domaines de la vie qu’on nécessite le chalom. Mais si ces symboles rappellent ’’où’’ on nécessite la paix, ils définissent également qu’est-ce que la paix. Qui n’aspire pas à la paix ?! Mais qui a véritablement connaissance de l’authentique définition de la paix ?! La paix n’est certainement pas ce que chacun exige de la part de l’autre.
Nous avons là trois éléments du rêve représentant la paix : le fleuve, l’oiseau et la marmite vide. Analysons-les pour mieux comprendre et vivre la paix.
Le fleuve : celui-ci a deux caractéristiques
1) chaque fleuve a une source d’où il puise son eau,
2) chaque fleuve a un courant.
Ces deux aspects sont majeurs pour définir la paix, ils peuvent être appréciés de plusieurs façons. Tout d’abord au nom de la paix on ne doit pas se détacher de sa source. Pour m’entendre avec les autres je n’ai pas le droit de m’éloigner des valeurs ancestrales, de la Tora et de mes principes convenables. On ne fait pas table rase sur des valeurs assises pour plaire aux autres. On agit, on est en mouvement, on a du ‘’courant’’ ; quelque soient les choix que vous faites dans la vie il y a ceux qui sont pour et ceux qui sont contre, ceux qui vous diront de ne pas faire et ceux qui vous diront de foncer. Qui écouter ? Allez dans le sens de la source et du courant qui vous animent et ne vous en abstenez en aucun cas au nom de la paix que l’autre vous impose.
L’oiseau : lui aussi peut avoir certainement plusieurs symboles ; toutefois, on a pu constater que tous les hommes rêvent de voler. Depuis son plus jeune âge le petit d’homme rêve qu’il est un oiseau et même dans son âge avancé l’homme investit dans son envol. L’oiseau fait rêver l’homme. L’homme oiseau est celui qui veut dominer le monde, le voir de plus haut, planer pour être paisible. Là aussi nous avons un élément d’élan qu’il ne faut surtout pas atténuer au nom de la paix.
La marmite vide : nous savons ce qu’est une marmite pleine mais que représente une marmite vide ? Allons dans le même sens jusqu’ici développé. La marmite en soi nous renvoie à la nourriture, mais lorsqu’elle est vide à quoi nous renvoie-t-elle ? A ce que nous aimerions manger ! Si je vois la nourriture je vois ce que je vais manger mais si je ne vois pas ce que je vais manger parce que la marmite ne contient rien je suis encore dans l’imagination de manger ce que j’aimerais manger, en simple je rêve !
Ces trois éléments symbolisent, pour ma part, l’élan auquel j’aspire profondément et c’est cela que j’appelle le chalom – la paix ; parce que s’il est important d’être en paix avec les autres il est tout aussi voire plus important d’être en paix avec soi-même.
Les conflits diverses que nous vivons autour de nous démarquent
1) l’absence de paix intérieur que nous vivons en et envers nous-même,
2) l’abolition de mes aspirations par ceux qui m’entourent.
Les gens qui revendiquent et clament la paix sont bien souvent des gens malhonnêtes qui vous empêchent de vivre et d’agir. Ils vous invitent à réviser vos positions mais eu ne le feront pas. Ils sont très forts pour exiger aux autres de corriger leur valeur, mais ils sont très faibles pour corriger les leurs. Si la paix se définit par respecter les choix de l’autre même si je les trouve absurde en vérité la paix va bien au-delà de cela. Je t’encourage à jaillir – la source, à t’envoler – l’oiseau, à rêver – la marmite vide même si je ne partage pas tes convictions. La paix commence là où l’autre m’invite à foncer. La paix s’arrête là où l’autre ferme le robinet, là où il encage l’oiseau, là où il remplit ma marmite.
En résumé si tu m’invites à une paix qui m’empêche d’exister alors révise ta définition de la paix !