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Tora, Prison ou Liberté 

Rav Imanouel Mergui

Chavouot est là ! Nous avons reçu la Tora en l’an 2448 de la création du monde, et la Tora continue de nous accompagner durant toute notre histoire. Notre vie tout entière, individuelle et collective, n’a de sens qu’à travers la Tora. Le monde tout entier n’a de droit à l’existence uniquement pour et par la Tora ! Il convient en cette veille de Chavouot de rappeler ce qu’est la Tora ? Pour certains la Tora c’est de la religion. Pour d’autres la Tora est le Livre qui contient les commandements de D’IEU adressés à l’homme, au peuple juif. Pour d’autres encore la Tora c’est un rouleau qu’on sort à quelques occasions pour y lire certains passages. Etc., les thèses ne manquent pas, des plus extrêmes aux plus insensées. Avons-nous demandé à la Tora elle-même ce qu’elle est ? Interrogeons-la ! Mais je veux surtout répondre à ceux qui voient dans la Tora un dogme emprisonnant, qui nous empêche d’exister et de faire ce que l’on a envie de faire ! La Tora ne respecte pas les émotions de l’être, iront certains jusqu’à dire. On ne peut pas manger ce qu’on veut (même lorsque c’est écrit cachère), on ne peut pas se marier avec qui on veut, on ne peut pas aller au club med, ni en boite de nuit etc. Je suis d’autant plus surpris que nos Sages ont un tout autre regard sur la Tora, selon les Maîtres cités dans Pirké Avot « il n’y a d’homme LIBRE seulement celui qui s’adonne et s’investi dans la Tora » ! (chapitre 6 – michna 2). Comment peut-il y avoir un tel écart entre ce que l’homme ressent de la Tora et ce que nos Sages voient dans la Tora ?! C’est perturbant qu’on soit si loin de la Tora. La Tora est synonyme de LIBERTE alors que l’homme la perçoit comme une PRISON !

Etudions cet enseignement pour y voir plus clair. De quelle liberté s’agit-il ? En sommes, il convient en toute honnêteté de définir de façon authentique qu’est-ce que la liberté ? Il est vrai que si liberté est synonyme de faire ce qu’on a envie de notre vie, alors oui la Tora est une prison. Mais alors justement comment être libre, par la Tora, si elle ne nous laisse pas faire ce qu’on veut quand on veut et où on veut ? D’un côté la Tora nous étouffe et elle s’annonce comme étant le seul système promettant à l’homme la liberté ! C’est cela la force de la Tora… Mais encore…

Tout d’abord revenons sur la source d’où les Maîtres tirent cet enseignement que la Tora donne la liberté à l’homme. Dans le Livre de Chémot 32-16 la Tora nous parle des Tables que D’IEU a transmises à Moché au mont Sinaï, à propos de celles-ci le verset dit « l’écriture divine était gravé sur les Tables ». Le mot gravé se dit ‘’h’aroute’’, alors les Maîtres disent qu’il faut lire ‘’h’éroute’’ – libre. Les Tables de l’Alliance transmises à Moché sont donc les Tables de la liberté !

Le Tiferet Israël dit que le cerveau de l’homme est tel les Tables sur lequel il nous faut graver la Tora – c’est alors que va s’exprimer la liberté de l’être. L’écriture de la Tora dans notre tête rend l’homme libre. De toute façon nous voyons que la liberté définie ici ne se trouve pas obligatoirement dans le simple fait de la pratique de la Tora mais plutôt dans l’étude de la Tora… Lorsque cette étude occupe tout l’esprit de l’homme alors il va sentir une liberté surpassant l’emprisonnement de la pratique des commandements de la Tora. L’étude de la Tora contient cette faculté de libérer l’homme. Lorsqu’on étudie profondément la Tora on se libère de tout. Il y a dans l’étude de la Tora une ouverture d’esprit qui dépasse tout emprisonnement soit-il. Ceux qui prétendent que les religieux sont des gens fermés d’esprit, parlent avec une ignorance absolue et cela même prouve qu’ils n’ont jamais ouvert un livre de Tora. Une vraie étude de texte du Talmud ouvre des perspectives de réflexion et de mode de vie que nul autre système n’est à même d’offrir à l’homme.

Le Midrach Chmouël note un point fondamental : la Tora est l’œuvre divine, de ce fit celui qui étudie la Tora bénéficie d’une protection telle qu’aucune créature ne peut le dominer, il est dans le divin, toutes les forces extérieures lui sont soumises. Cela veut dire que lorsqu’on étudie la Tora on se retrouve dans l’énergie divine, maîtresse de toutes les énergies, là rien n’a d’emprise sur l’homme. Lorsqu’on dit que la Tora libère l’homme, et qu’on s’interroge mais de quoi elle le libère ? La réponse est que la Tora le libère de tout parce qu’il surpasse tout, il est dans le divin. Le Yaavets écrit : celui qui étudie la Tora est on ne plus proche de D’IEU car elle est l’œuvre divine, les Tables sont gravées par D’IEU lui-même ! D’IEU a pris le soin d’écrire de ses propres mains la Tora, et, dit-il, la meilleure façon de respecter D’IEU est de se pencher sur son joyau.

Les lettres n’étaient pas gravées physiquement sur les Tables, rappelle le Leh’em Chamaïm, les lettres planaient au-dessus des Tables ! N’en soyons pas surpris, n’oublions pas que nous parlons d’une œuvre divine, surpassant la matière. Celui qui étudie la Tora est telles les lettres de la Tora, il n’est pas emprisonné dans la matière, c’est lui qui gère la matière. Il voit les choses de haut au lieu d’être enfoncé dans ce qui l’entoure ! 

Rabénou Chem Tov explique : la liberté dont il s’agit ici c’est être libre 1) de l’ange de la mort, 2) du yetser hara, 3) du poids des nations – comme le note également le Meam Loëz : l’exil amère que nous traversons connaît son origine à cause de notre abandon de la Tora ; pour être préservé de ces trois monstres D’IEU nous a donné la Tora pour qu’on se colle à Lui ! Cela veut dire : soit tu es libre de faire ce que tu veux dans la vie mais tu devras affronter ces trois ennemis de taille, soit tu suis la voie de la Tora et tu es manifestement libre de ces trois adversaires. Il n’existe aucun moyen pour en être épargné si ce n’est que l’étude investie de la Tora.

Le Pirké Moché soulève une liberté nécessaire à la vie : en étudiant la Tora l’homme bénéficie du concours de la Providence Individuelle – hachgah’a pratite, cela le protègera des drames qui surviennent dans le monde.

Et, rajoute-t-il, celui qui est dans la Tora même si des épreuves l’atteignent il est serein il sait que ceux là n’agissent que sur le corps, son esprit restera libre. Là il y a quelque chose de sensationnel : admettons que la Tora soit vécue et ressentie telle une prison puisqu’elle limite notre champ d’action, en tout cas une chose est sûre c’est que la Tora offre à l’homme une liberté cérébrale, mentale, psychique, intellectuelle etc. La Tora libère l’esprit de toute menace soit-elle. Chose improbable dans le monde du ‘’je fais ce que je veux’’.

Allons plus loin, le Midrach Chmouël rappelle que l’homme est composé d’une ‘’néchama’’, celle-ci est emprisonnée dans la consommation excessive des jouets de la vie matérielle, avec la Tora on libère notre néchama de cette prison illusoire matérialiste. Le corps ne sera en rien emprisonné à son tour, ou léser, bien au contraire ainsi le corps suivra le monde de la néchama et à son tour il goûtera à la liberté de l’âme ! L’âme invite le corps dans son univers et l’intègre alors que le monde du corps exclu l’âme !

Rav Barouh’ Shulem et Rav Amos Shulem (Avot Oubanim page 664) écrivent une phrase percutante : celui qui n’étudie pas la Tora se dirige vers les endroits les plus obscurs de la vie, alors que celui qui étudie la Tora rencontre la lumière absolue ! C’est cela la liberté rencontrer la lumière illimitée, point d’obscurité. La Tora est le phare de la vie !

Mais si tu prétextes que c’est le yetser hara qui t’empêche d’une quelconque façon de te rapprocher de la vérité et de la lumière, sache, note le Meam Loëz, que justement c’est en te rapprochant de la tora que le yetser hara tu combattras ! N’attends pas de ne plus avoir de yetser hara car ce n’est que la Tora qui peut y remédier. Soyons honnêtes, peut-être que cela nous arrange d’être animé de ce fameux yetser hara, qui n’est rien d’autre que poudre dans les yeux, illusoire et mensonger ! Seul celui qui étudie la Tora ne s’écroule jamais, à la différence de celui qui s’éloigne de la Tora il ne trouvera nulle part la force de rester debout, conclut le Meam Loëz ! La vie te promet monts et merveilles qui finissent par drame et frustration, colère et jalousie, orgueil et insatisfaction, choses que celui qui étudie la Tora ne connaît pas.

Soucieux d’obtenir plus de respect, plus d’argent, ou encore esclave du qu’en dira-t-on et que pense de moi la société…, est le sort de celui qui croit être libre sans Tora, rappelle Rav Mougrabi (Avot Oubanim volume III page 406). Lorsqu’un Rav est parti rendre visite à un proche parent à l’hôpital il rencontra également un jeune homme accidenté qui avait compris que son mode de vie changerait désormais. Le patient dit au Rav ‘’priez pour que je meurs je ne pourrais plus jamais jouir de la vie tel que je me l’imaginais !’’. La Tora nous apprend que l’on peut profiter de la vie même si elle ne répond pas à nos désirs !, poursuit Rav Mougrabi.

Je vous souhaite une bonne et grande fête de Chavouot, une réelle réception et réceptivité de la Tora. Que nous puissions voir tous les souhaits de ces commentaires se réaliser très vite pour nous et tout le peuple d’Israël. Rappelons encore ce que le prophète Eliyahou nous enseigne ‘’ceux qui étudient la Tora augmentent le CHALOM dans le monde’’ ! Y-a-t-il plus liberté que paix ?!?! Cette paix que tous recherchent, tous désirent, tous investissent, mais tous échouent. Sans Tora point de Chalom ni dans le monde, ni dans les couples, ni dans les familles, ni dans les nations, nulle part. Seule la Tora assure et promet le CHALOM, le VRAI !  

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