Rav Imanouel Mergui
… Poursuivons notre étude basée sur l’enseignement du traité Chabat 119b :
« Oûla dit : Yérouchalaïm n’a été détruite seulement parce que ses habitants s’étaient défaits de la ‘’bochète-panim’’ (la gêne) comme en témoigne la prophétie citée dans Yéchâyia : ils fautaient et ne ressentaient aucune honte ». La gêneest un thème en soi qui connaît de multiples facettes ; mais il s’agit là d’une honte particulière : celle de la faute commise. Effectivement tout homme commettant une erreur, volontairement ou involontairement, consciemment ou non, s’il est doté ‘’d’un peu’’ de bon sens ressentira à un moment donné de la honte d’avoir commis cette faute. Cette honte du mal qui a été fait est ce qui lui permettra d’avancer, et surtout de corriger son erreur ! Ce phénomène de la ‘’non gêne’’ de nos erreurs est encore, malheureusement, encore d’actualité. Effectivement il arrive souvent que lorsqu’on fait une remarque à une personne par rapport à une erreur commise on s’entend dire ‘’et alors ?!’’. Ce ‘’et alors ?!’’ témoigne d’une certaine nonchalance de la part du fauteur. Pire encore le phénomène de notre ère que je nommerais ‘’la fierté de sa faute’’. On est témoin de transgresseurs qui se vantent de leur mode de vie incohérent à la vie et surtout à la Tora. Certains se disent fiers de vivre dans le mariage ‘’mixte’’. D’autres sont fiers de travailler chabat. Beaucoup se croient des ‘’stars de la médisance’’ – ils seraient même prêts à revendiquer un oscar !!! On est dans un monde de ‘’malades’’, il ne faut pas s’insurger ou se plaindre des catastrophes chaotiques tel la destruction de Yérouchalaïm qui ne cesse d’accroître… Ne soyons pas étonner des malaises ‘’yérouchalmites’’ qui hantent notre quotidien tant que nous ne faisons RIEN pour améliorer ces vices. Avoir honte de sa faute c’est reconnaître qu’on n’est défait de la toute-puissance universelle ; et, cette prise de conscience de l’authenticité de notre rôle laissera la place au souverain qui jouera enfin son rôle de libérateur. En simple : l’homme sans gêne est destructeur de la cité rayonnante. Le ‘’sans gêne’’ obscurcit son éclat.
« Rav Yitsh’ak enseignait : Yérouchalaïm n’a été détruite uniquement parce qu’ils considéraient du même niveau le Grand et le Petit comme dit le verset etc. ».
Sur cela je n’ai qu’une seule chose à dire : de nos jours on a placЀ le Petit au-dessus du Grand… !
Yérouchalaïm est la cité des valeurs, la cité où chacun est reconnu comme étant ce qu’il est véritablement et, par conséquent chacun occupera SA place. Yérouchalaïm ne supporte pas ce mensonge d’égalité ! Si tous les hommes sont tous égaux devant la loi ils ne sont pas égaux dans leur état caractériel, individuel et encore moins dans ce qu’ils représentent. L’égalité est un mensonge. Pire encore : donner à l’un la place de l’autre est une catastrophe. Beaucoup plus pire encore est de placer l’inférieur à la tête du supérieur. N’oublions pas que D’IEU lui-même est appelé ‘’makom’’. Rappelons également que lorsque D’IEU ordonne à Avraham de ligoter Yitsh’ak il ne lui indique pas clairement le Mont Morya, il lui dit de se rendre « à l’endroit où je t’indiquerais ! ». Le Mont Morya qui deviendra le Mont du Temple n’est autrement nommé que le Mont de l’Endroit. Non pas l’endroit indéfini, mais plutôt l’endroit par excellence. En ce lieu le ‘’mal placé’’ est un destructeur – un ‘’terroriste’’ comme on dit aujourd’hui !
« Rav Âmram fils de Rabi Chimon bar Aba a dit au nom de son Père qui enseignait au nom de Rabi H’anina : Yérouchalaïm n’a été détruite uniquement parce qu’ils ne se faisaient pas de remontrances comme dit le verset etc., ils enfonçaient leur visage dans la terre et ne se faisaient aucune
Yérouchalaïm dans le chaos (3ème partie) – suite
remontrance ». La remontrance est un sujet en soi, il est d’ailleurs un commandement de la Tora que de réprimander le fauteur. S’il est très difficile d’adresser une remontrance à l’autre il est encore plus dur d’entendre et surtout d’accepter cette remontrance énoncée par l’autre. Mais ici le maître ne met pas en garde celui qui ne reçoit pas la remontrance, il accuse davantage celui qui ferme les yeux face aux erreurs de l’autre. C’est la politique de l’autruche, faire comme si on n’avait pas vu les fautes de l’autre. C’est occulter la vraie facette de l’autre. Ceci conduit inévitablement au mensonge, à l’hypocrisie, à l’indifférence et au délaissement de l’autre. Yérouchalaïm est la cité de l’Endroit où chacun a une place adaptée et où chacun doit reconnaître l’autre dans son entièreté et dans la place qu’il occupe. En réalité se voiler la face sur l’autre c’est se voiler la face sur soi-même… ! Yérouchalaïm est la cité de la vérité, la cité où les vices n’ont pas de place, la cité où les fauteurs n’ont qu’un exercice à faire pour y rester : corriger leurs vices. Ne pas réprimander l’autre c’est accepter son erreur, c’est accepter le concept même de la faute. C’est, tout simplement, accepter que Yérouchalaïm peut vivre dans le péché.
« Rabi Yéhouda a dit : Yérouchalaïm n’a été détruite seulement parce qu’ils méprisaient les gens qui étudiaient la Tora comme dit le verset etc.. Rav Yéhouda enseignait au nom de Rav : celui qui méprise un ‘’talmid h’ah’am’’ ne connaîtra pas de remède à sa plaie ! ». Si la notion du mépris est majeure dans toutes les relations avec quiconque elle est surdimensionnée lorsqu’il s’agit du mépris à l’égard de celui qui étudie la Tora. Nous le voyons bien dans les lois relatives au comportement qu’on doit adopter envers une personne qui étudie la Tora. Le H’afets H’aïm a longuement traité du phénomène de médisance envers le talmid h’ah’am il le condamne d’ailleurs très sévèrement. Le pire c’est lorsque les talmidé h’ah’amim se déchirent entre eux et que chacun médit sur l’autre. C’est un manque de reconnaissance de ce que l’autre est et c’est surtout un mépris pour la Tora. Si aujourd’hui on nous parle beaucoup de respect de soi c’est parce que l’homme moderne n’a pas idée de ce que représente l’homme en lui-même, il n’a pas une image juste de la valeur de l’Homme – avec un grand H. Cette image lui est absente parce que ceux qui représentent pleinement l’Homme sont la risée du peuple et de ses chefs. C’est sans scrupule qu’on maltraite les maîtres de la Tora. C’est ‘’sans gêne’’ qu’on les prend pour des ‘’petits’’ et qu’on ne leur reconnaît pas toute leur ‘’place’’. Quel remède existe pour ceux qui sont atteints de ce cancer ? AUCUN !!! Toucher au talmid h’ah’am c’est se blesser mortellement. Demandez à l’ancienne génération le respect qu’ils avaient au Maroc, en Tunisie etc. envers les Maîtres… Aujourd’hui on ne respecte que les tzadikim qui sont morts. Je crois bien que si on leur demandait conseil ils nous diraient de respecter ceux qui sont vivants ! Yérouchlaïm, en tout cas, ne peut supporter le mépris du talmid h’ah’am.
« Rava enseignait : Yérouchalaïm n’a été détruite uniquement parce qu’il n’y avait plus d’hommes dignes de confiance dans le commerce ». Si l’homme doit être parfait et intègre dans sa Tora il doit l’être également dans son travail. Yérouchalaïm est la cité du rapport droit même dans les échanges autre que Tora.
La guémara a compté 8 points qui sont à l’origine de la destruction de Yérouchalaïm : 1) la transgression du chabat ; 2) l’annulation du chémâ ; 3) l’éloignement des enfants de la maison d’étude ; 4) le manque de scrupule à la faute ; 5) la mise à égalité du petit et du grand ; 6) l’absence de remontrance ; 7) le mépris du talmid h’ah’am ; 8) la malhonnêteté dans les rapports commerciaux…
Fasse Hachem que nous puissions corriger nos vices et retrouver Yérouchalaïm dans toute sa splendeur.