Rav Imanouel Mergui
Le but du présent article n’est pas de critiquer vainement mais plutôt de prendre conscience de certaines lacunes de notre société voire de notre communauté et en l’occurrence : LA MEDISANCE.
Le H’afets H’aïm disait que les découvertes modernes sont un moyen pour nous faire réfléchir sur les faiblesses de l’homme. En son temps (il y a plus d’un siècle) les moyens de transport n’étaient pas aussi développés qu’aujourd’hui. Lorsque la voiture fera partie de la vie quotidienne il dira : les hommes d’antan étaient plus zélés que ceux d’aujourd’hui, de nos jours les hommes se délaissent et sont devenus plus fainéants, ils ont besoin de la voiture pour se déplacer plus rapidement. Il faut donc utiliser le bon coté de chaque chose. Il serait intéressant de réfléchir un temps soi peu sur ce qu’il y a de plus développé et de plus moderne aujourd’hui je veux dire ‘’internet’’…, ses avantages et ses dangers !
Nous dirons la même chose concernant la télécommunication. Le téléphone, le portable, le fax, internet etc. ainsi que les médias en tout genre sont autant de moyens modernes pour pouvoir COMMUNIQUER avec le monde. Or ce qui semble paradoxal c’est qu’on ne s’est jamais autant heurté à tant de questions sur la COMMUNICATION. Couples, parents-enfants, enseignants-élèves, hommes politiques etc. La problématique de notre génération est que les gens n’arrivent pas (ou plus) à communiquer ! Etonnant ! Et cela parce qu’on ne fait pas bon usage de la technologie. (Attention ! Mon discours ne défend pas l’idée qu’il faille ‘’tout interdire’’ mais qu’il faille ‘’tout corriger’’ – utopique ou prétentieux ?!). Mon grand Maître Rav Wolbe ztsoukal fait remarquer que D’IEU dota l’homme de la parole qui est un outil de rapprochement mais voilà que l’homme l’emploie bien souvent dans le sens contraire, pour : éloigner, écraser, détruire, repousser… Le prophète s’est exprimé clairement « La vie est la mort dépendent de la langue » – ‘’Michleï 18.
Pour illustrer ce verset, le Midrach Téhilim 39 raconte la parabole suivante : le roi était gravement malade. Pour sa guérison les médecins lui conseillèrent de consommer du lait de lionne. Il fallait un homme courageux pour aller traire la lionne. Un homme se présenta au roi et lui dit que pour arriver à cette fin il lui fallait dix chèvres. On les lui donna. Il s’approcha d’une lionne qui allaitait son lionceau. Le premier jour il donna à la lionne, une chèvre… Le deuxième jour il lui en donna une autre et s’approcha un peu plus de la lionne. L agit ainsi plusieurs jours durant jusqu’au jour où il se trouva tellement proche de la lionne qu’il joua avec elle et trait ainsi son lait. Au chemin du retour l’homme s’endormit et fit un rêve : ses membres se chamaillèrent. Les pieds disaient ‘’c’est grâce à nous qui avons marché qu’on a obtenu ce lait’’. Les mains défendirent leur cause ‘’sans nous il n’aurait pas pu traire le lait’’. Le cœur surenchérit ‘’sans mon idée rien n’aurait pu être fait’’. Arriva la langue qui affirma que sans elle rien ne se serait passé. Les autres membres la condamnèrent sévèrement. La langue leur dit ‘’aujourd’hui même je vous prouverai que c’est bien moi qui est au-dessus de
tous les autres membres !’’. A son réveil l’homme accourut chez le roi lui apporter le lait, mais voilà qu’en lui tendant le lait il le présente au roi en lui disant c’est du lait de ‘’chienne’’. Aussitôt le roi ordonna de le pendre parce qu’il avait demandé du lait de lionne. Avant qu’on l’exécute, l’homme dit au roi : ‘’en fait c’est du lait de lionne que j’ai apporté’’. On examina le lait et il s’avéra qu’effectivement c’était du lait de lionne. Les autres membres du corps reconnurent alors le pouvoir supérieur de la langue ; « la vie et la mort dépendent de la
langue ! ».
Notre parler doit être cohérent avec notre comportement.
Ne savez-vous peut-être pas que lorsqu’on prononce et entend du mal sur autrui on est susceptible de transgresser près de 34 commandements de la Tora ! Rav Israel Meir Kagan Hacohen zal a compilé le fameux « HAFETS HAIM / CHEMIRAT HALACHON » pour dicter la halah’a : quand et comment est-il PERMIS et INTERDIT de prononcer du mal sur autrui.
Lorsque D’IEU créa l’homme il le dota d’un pouvoir énorme que nulle autre créature ne possède : LA PAROLE. Or nous savons que la parole est l’expression de la pensée et la pensée est le produit de l’intellect et le propre de l’intellect est le libre arbitre. En d’autres termes ce qui diffère l’être humain ou plus exactement l’HOMME des autres êtres c’est la faculté de la parole ; cette parole qui est instinctive chez l’animal alors que chez l’homme elle est réfléchie. La parole chez l’homme est issue de la réflexion. PARLER c’est CHOISIR ce qu’on dit et ce qu’on se retient de dire. Dire du mal sur l’autre c’est de deux choses l’une : ou on a parlé sans réfléchir et donc on ne s’est pas conduit comme un humain, ou bien on a choisi de dire du mal et, chose plus grave, on a usé de notre pouvoir humain sans avoir adopté une conduite adéquate.
Cependant me direz-vous ‘’parfois on est obligé de médire !’’. OBLIGÉ ! Pourquoi ? ‘’Pour se défendre .Pour s’affirmer. Pour se protéger. Etc.’’, autant de justificatifs qui, pourtant, ne tolèrent pas de médire (et d’entendre du mal). Si on a quelque chose à « reprocher » à l’autre pourquoi le divulguer ? Allons voir la personne concernée directement pour lui faire part de ce qui nous dérange et s’arranger avec elle éventuellement ! Dire du mal c’est choisir délibérément le chemin qui aboutira fatalement à la division, la querelle et la rupture. N’oublions pas que la médisance nous désunit des êtres auxquels on doit vivre en union tels nos proches, nos parents, nos enfants, notre conjoint, nos maîtres, nos élèves, nos voisins, nos amis.
Le MAHARAL et le HAFETS HAIM affirment clairement que la longévité de notre exil est due à la médisance et plus particulièrement celle prononcée à l’égard de ceux qui représentent la Tora ; car, plus on éloigne l’autre de notre entourage, plus on éloigne D’IEU de notre univers ! Revendiquer à D’IEU (et non aux politiciens !) le retour sur notre terre, la reconstruction du Temple, la venue du Machiah’, tout ça c’est prendre sur soi le rapprochement des êtres qui n’est plausible SEULEMENT par nitre façon de communiquer.
Et, pour ne pas prononcer (et entendre) du mal sur l’autre il faut prendre sur soi de ne voir en l’autre que son bien, son positif.
De la même façon qu’on se rapprochera de l’autre et qu’on ne verra que le bien qui est en lui ainsi on sera à même de demander à D’IEU qu’IL agisse de la sorte avec nous.