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L’idolâtrie ou comment être un bon juif ?!

Rav Imanouel Mergui

L’idolâtrie est un sujet tabou de nos jours et ce pour plusieurs raisons ; primo : le yetser hara de l’idolâtrie est très faible par rapport au passé où les Enfants d’Israël y étaient énormément investi. Secundo : toute mise en garde contre l’idolâtrie est accompagnée inévitablement d’une critique des cultes étrangers, or de nos jours la critique est très mal vécue (et très mal véhiculée), il est vrai que les générations passées en ont subi de lourdes conséquences celles-ci allant jusqu’à se traduisant par des pogroms et persécutions. Alors certains ont préféré créer des associations d’amitié ‘’judéo-chrétiennes’’ ou pire encore certains ont introduit l’idolâtrie dans leur système comme le veulent les réformés (partiels ou total…). On se retrouve donc aujourd’hui face à un des problèmes des plus majeurs assurant l’existence et le maintien du peuple d’Israël : comment s’éloigner des peuples sans froisser personne et sans se mêler à eux ? Cette question n’a pas trouvée de réponse claire aujourd’hui, preuve en est le taux de mariages mélangés atteint des proportions alarmantes et il ne reste que les larmes pour pleurer. Pleurer pour ces couples défoncés. Pleurer pour ces familles abîmées. Pleurer pour le peuple d’Israël frappé de tous les côtés. Pleurer pour l’avenir d’Israël. Les conversions sauvages n’ont fait qu’aggraver la situation et augmenter les mariages dits ‘’mixtes’’. Nous nous voilons la face de peur de nuire à nos pseudo bonnes relations d’avec les peuples qui de toutes les façons restent nos ennemis malgré les unions échangées. Depuis le début de l’histoire du monde et ce jusqu’à la fin des temps l’idolâtrie est la hantise d’Israël, son ennemi numéro UN ! Les textes bibliques et talmudiques condamnant et excluant l’idolâtrie sont trop clairs pour qu’on s’amuse à les déjouer. Il serait quasi inutile de citer les textes de la Tora et des prophètes mettant Israël en garde de s’éloigner de l’idolâtrie et de ne point se lier avec les cultes étrangers d’aucune façon. Il y a un point qui a particulièrement retenu mon attention que je voudrais partager avec vous (à moins que vous ne fassiez partie de ces ‘’amitiés mensongères’’…). Les Sages et Maîtres du Talmud ont souvent usé de l’idolâtrie comme référence à tout comportement vil. Lorsqu’ils veulent conseiller à l’homme de ne point se comporter d’une façon immorale ils ont usé du symbole de l’idolâtrie pour l’en éloigner. Je citerais quelques exemples auxquels une étude plus approfondie serait nécessaire. Le Maharal, notamment, verra dans ces textes bien plus qu’un abus de langage ou une comparaison symbolique. Le Maharal trouvera une réelle correspondance entre ces comportements immoraux et l’idolâtrie et ira jusqu’à dire que ces agissements vils sont réellement de l’idolâtrie !
Chabat 105b « Rabi Chimon Ben Elazar dit au nom e H’ilfa Bar Igra qui enseigna au nom de Rabi Yoh’anan ben Nouri : celui qui déchire ses vêtements dans sa colère, celui qui casse des objets dans sa colère et celui qui dilapide son argent dans sa colère tu le considèreras comme un idolâtre, car telle est l’œuvre du yetser hara aujourd’hui il dit à l’homme d’agir ainsi et demain il lui dictera un autre comportement jusqu’à ce qui le conduise à commettre l’idolâtrie. Rabi avin disait : nous apprenons cela à partir d’un verset qui annonce ‘’il n’y aura pas en toi de dieu étranger’’ – quel est ce dieu étranger qui se trouve dans l’homme ? C’est le yetser hara ! ». Le début de l’enseignement nous dit que le yetser hara peut conduire l’homme à l’idolâtrie puisque sous l’emprise de la colère et de manière plus générale sous l’emprise du yetser hara l’homme est complètement soumis et se laisse guider. L’homme ne se maîtrise plus. Cette qualité d’être est en soi de l’idolâtrie c’est ce que dit Rabi Avin : le yetser hara est lui-même l’idolpatrie, c’est bien plus qu’il conduit l’homme vers le chemin des cultes étrangers c’est qu’il est lui-même intrinsèquement parlant le culte étranger. Il n’y a aucune différence entre un pape et entre un juif nerveux !!! Un juif qui se laisse guider par ses instincts et ses pulsions, qui traduisent l’œuvre du yetser hara, est le Père d’un culte idolâtre !

L’enseignement du traité Méguila est très fort, voilà ce qu’on peut y lire (13a) « dans le récit d’Esther, lu à Pourim, nous trouvons que Mordéh’aï porte le nom de YEHOUDI, pourquoi cette appellation ? Rabi Yoh’anan répond : c’est parce qu’il avait renié l’idolâtrie qu’il est nommé ainsi, tout celui qui rejette est appelé Yéhoudi !!! ». Le juif – ‘’yéhoudi’’ – est reconnu comme tel dans son rapport qu’il entretient avec l’idolâtrie et les cultes étrangers !!! On est juif parce qu’on l’est c’est clair c’est un fait, cependant le nom qu’on porte doit refléter de ce qu’on est si on est juif on doit porter ce nom et se comporter à la hauteur de ce qu’il représente. Il ne doit pas y avoir de décalage entre ce qu’on est et ce qu’on porte comme nom. Être juif est insuffisant en soi ; on doit porter un nom digne de ce que veut dire être juif. Ce nom en question est bel et bien ‘’yéhoudi’’. La qualification de ce nom se trouvera chez celui qui rejette tout ce qui est synonyme de avoda zara – c’est ainsi qu’on reconnaît un juif à part entière.

Si ces passages talmudiques peuvent être compris ne serait-ce que superficiellement, je veux dire que le rapport entre l’idolâtrie et ce qui en est comparé peut attirer notre compréhension, le passage qui suit sera plus délicat et moins évident ; c’est un enseignement cité au traité Kétoubot 68a « Rabi H’iya Bar Rav Midifti dit au nom de Rabi Yéhochouâ ben Korh’a : celui qui détourne ses yeux face à la tsédaka est comparé à celui qui sert l’idolâtrie ! ». Il sera effectivement plus difficile d’admettre que le refus de donner de son argent à la tsédaka est une forme d’idolâtrie. Certains diront simplement que celui qui a du mal à mettre la main dans la poche pour respecter cette mitsva c’est qu’il reconnaît à son argent une valeur à laquelle il ne peut se défaire, on dira plus simplement qu’il divinise son argent !, sinon pourquoi a-t-il tant de mal à le partager. Le juif doit comprendre que l’argent est loin d’être ce à quoi il faut s’accrocher. Le juif est riche mais surtout le juif sait donner de son argent. Il ne fait pas de l’argent une valeur absolue. Donner pour faire exister l’autre certes, mais donner surtout pour montrer que j’existe moi-même plus que mon argent ! Cet exercice contient cependant un danger celui de se reconnaître à soi-même une valeur divine, mais là encore nos Sages nous surprennent lorsqu’ils annoncent au traité Sota 5a qu’il convient de déraciner comme un arbre de avoda zara toute personne étant animée d’orgueil. Ne pas donner un sens existentiel à son argent pour montrer que je suis moi-même au-dessus de mon argent ne doit pas me conduire à penser que je suis moi-même au-dessus de toute autre chose. Si l’orgueil est condamné au point d’être détruit tel un arbre de avoda zara il y a des comportements comparés à planter des arbres pour la avoda zara c’est-à-dire qui sont comparés à augmenter la avoda zara, c’est ce que nous livre l’enseignement des Maîtres rapporté au traité Sanhédrin 7b lorsqu’ils disent que ceux qui nomment un juge incorrect sur la communauté c’est comme s’ils plantaient des arbres de cultes étrangers… Une communauté qui a à sa tête des guides impropres est un culte étranger. Loin s’en faut de voir ici une condamnation extrêmement sévère, effectivement la raison est simple : si le guide est incorrect il guidera la communauté à des fins incorrects et donc incohérentes avec la Tora…

Et enfin pour clôturer cette analyse ‘’avodazaratique’’ on ne pourra se passer d’un passage du Yérouchalmi Avoda Zara 1-2 des plus surprenants. Il nous annonce : « tout homme qui détruit sa matière séminale c’est comme s’il servait des cultes étrangers !!! ». La pudeur du sujet nous oblige à ne pas en traiter davantage en ces lignes ; nous dirons au moins que la pudeur est justement une des qualités d’Israël qui le distingue des autres nations. Cette pudeur se veut être une qualité même de l’homme vis-à-vis de lui-même. Détruire sa matière séminale c’est l’extérioriser alors qu’elle doit être utilisée plutôt dans l’intériorité…

Tous les matins nous récitons la bénédiction : « qu’IL ne m’a pas fait idolâtre… »                        

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